Les lieux du TV noir – URBI… (1/2)

Par Ioanis Deroide, le 8 janvier 2023

Les images et vidéos suivantes sont proposées en complément de mon article « Le TV noir : urbi et orbi« , paru dans Saison n°4.

Quand The Untouchables [Les Incorruptibles] (ABC, 1959-1963) choisit de faire revivre le Chicago criminel des années 1930, celui-ci est déjà mythifié par la littérature et le cinéma. Du noir cinématographique, la série retient l’esthétique, la violence et certaines figures rares au petit écran comme la femme fatale.

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Le New York naturaliste de Naked City (ABC, 1958-1963) se teinte souvent de noir, ici par le réemploi d’un familier du genre, Claude Rains, dans l’épisode « To Walk in Silence » (S02e05).

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Le générique minimaliste de Dragnet (NBC, 1951-1959) n’est constitué que d’une seule image, celle du badge du detective Joe Friday. Si ses enquêtes le conduisent dans différents quartiers de la ville (et surtout, en fait, dans les studios de Walt Disney à Burbank où était tourné l’essentiel des épisodes), son insigne représentant le building du City Hall de Los Angeles figure la centralité métropolitaine indissociable des premières séries policières.

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Peter Gunn (NBC, 1958-1961), un des exemples les plus explicites de TV noir, est aussi – avec Johnny Staccato (voir ci-dessous) – celle qui associe le plus noir et jazz. Mis en exergue dans le thème de son générique, devenu plus célèbre que la série elle-même, le jazz se donne aussi à voir et à entendre au Mother’s, le club où Gunn a ses habitudes.

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Jazz encore dans Johnny Staccato (NBC, 1959-1960), où le héros éponyme, à la fois pianiste et détective privé à New York, est interprété par John Cassavettes, qui réalisa lui-même 5 des 27 épisodes que compte la série.

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Dans les années 60 et 70, les séries policières s’éloignent du noir, même s’il en reste des traces dans Kojak ou The Streets of San Francisco par exemple. Dans les années 80, elles s’en rapprochent de différentes manières : Mickey Spillane’s Mike Hammer (CBS, 1984-1987), parodie les classiques du genre…

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…mais son New York eighties peine à susciter les mêmes émotions.

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A contre-courant de cette nostalgie, la très moderne Miami Vice (NBC, 1984-1990) place la grande ville floridienne sur la carte du TV noir.

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Au tournant des années 80-90, Vancouver s’y inscrit aussi, d’abord discrètement dans Wiseguy (CBS, 1987-1990), puis plus explicitement dans Profit (1996), dont le protagoniste maléfique annonce la vogue des "nouveaux méchants".

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Cela ne suffit pas, loin s’en faut, à épuiser le filon nostalgique, à tel point qu’on peut se demander si, depuis la fin des années 50, seul le period drama est encore apte à produire du noir métropolitain classique, c’est-à-dire situé à New York, Chicago ou Los Angeles, à l’image de Perry Mason (HBO, 2020-).

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Une série qui invite à se demandé si le noir classique ne peut plus être ressuscité aujourd’hui qu’au moyen d’une reconstitution / réimagination numérique, fût-elle magnifique.

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S’en tenir là, ce serait oublier que dès le début des années 1970, Kolchak: The Night Stalker proposait de faire évoluer la figure de l’enquêteur noir urbain en l’amenant vers d’autres genres, ici l’horreur et le fantastique.

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Proposition reprise dans Angel (The WB, 1999-2004) qui nous ramène à Los Angeles mais sur les pas d’un vampire-détective en quête de rédemption. Dès le générique, la noirceur de Downtown L.A. est affirmée à deux niveaux. Dans le premier plan, le quartier d’affaires illuminé est le signifiant d’un pouvoir financier et juridique que la série considère comme foncièrement corrompu (voir Wolfram & Hart).

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Tandis que dans le dernier plan, c’est la mythologie des allées sombres typiques des quartiers centraux qui est convoquée pour souligner la solitude du héros.

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Soit une vision de la métropole californienne pas si éloignée de celle de Bosch (Amazon Prime, 2014-2021), la plus angelena des séries policières noires récentes.

Mais Angel, le chevalier urbain aux pouvoirs surhumains, et dont le terrain de chasse est très local, a aussi pu influencer les super-héro.ïnes new-yorkais.es de ces dernières années. Alors que leurs homologues de cinéma parcourent le monde voire la galaxie, Daredevil (Netflix, 2015-2018) et Jessica Jones (Netflix, 2015-2019) ne sortent guère de leur quartier de Hell’s Kitchen.

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Ignorant à peu près la gentrification que connaît le quartier, les deux séries préfèrent conserver l’image d’un quartier dangereux propice au noir. Dans Jessica Jones, le trauma subi par la super-héroïne vient relativiser considérablement la supériorité que lui confèrent ses pouvoirs et noircit d’autant plus son personnage de femme détective privée.

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Arrow (CW, 2012-2020) est une autre série de super-héros mais qui se déroule dans une ville fictive, Starling City. Elle place le thème très noir de la corruption urbaine au cœur de son propos et met en scène, systématiquement au cours de sa première saison, le motif de la punition.

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Autre métropole imaginaire, la célèbre Gotham City peut revendiquer le titre de ville la plus noire. Dans Gotham (Fox, 2014-2019), les marqueurs du noir new-yorkais ou chicagolais sont poussés à l’extrême pour produire une ville côtière détrempée et continuellement couverte de nuages menaçants qui figurent son état sécuritaire et moral critique.

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Dans Gotham, la pérennité du noir est signifiée par des décors (ici, celui du commissariat) et des costumes qui relèvent du mash-up chronologique : tournée à New York, elle propose un noir diachronique qui emprunte des éléments à différentes décennies, refusant ainsi de trancher entre period drama respectueux et actualisation hasardeuse.

Lire la suite : Les lieux du TV noir…et Orbi.

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